jeudi 9 juin 2022

IL Y A 50 ANS, LES NOUVELLES CHEERLEADERS DES COWBOYS DE DALLAS FAISAIENT SENSATION, AU GRAND DAM DU COACH TOM LANDRY !

















Il y a 50 ans, cette année, les nouvelles cheerleaders des Cowboys de Dallas bouleversaient le monde de la Ligue Nationale de Football.  Après avoir été choisies parmi une centaine de candidates, les sept membres originales de ce nouveau squad de Pom Pom Girls s'étaient entraînées tout l'été, sous la direction de la réputée chorégraphe Texie Waterman.

UNE  ENTRÉE  FRACASSANTE !

En septembre 1972, elles ne se doutaient pas que leur première apparition publique lors du match inaugural des Cowboys allait faire autant sensation.  L'équipe de l'entraîneur en chef Tom Landry venait de gagner son premier Super Bowl, et l'immense foule rassemblée au Texas Stadium attendait impatiemment l'entrée des joueurs sur le terrain afin d'acclamer ses champions.

Lorsqu'ils firent enfin leur entrée triomphale sur la surface de jeu, ils étaient précédées par sept superbes cheerleaders, revêtant un splendide nouvel uniforme, disons...très sexy !  Du jamais vu, en fait.  Et lorsqu'elles ont performé leur routine d'un tout nouveau genre, ça aussi c'était inédit !  Tout un effet «WOW» !



Avec leurs danses synchronisées et chorégraphiées, et leur fameux «kick» montant au-dessus de leur tête, ces jolies jeunes femmes agitant leurs pompons, ressemblaient plus aux danseuses du «French cancan» qu'aux vraies cheerleaders traditionnelles exécutant des acrobaties, des sauts et des pirouettes.  En vérité, c'étaient des «show girls».  Et c'est ce que Tex Schramm, le gérant général des Cowboys, avait toujours voulu depuis qu'il avait pris les rênes de ce club d'expansion en 1960.

UN  GÉRANT  GÉNÉRAL  INNOVATEUR

Schramm (photo ci-dessous) venait de la télévision (CBS Sports) et il avait saisi tout  l'énorme potentiel d'attraction et de popularisation de ce média relativement nouveau et en plein essor.  Avant de devenir un administrateur chez CBS, il avait été directeur de la publicité avec les Rams de Los Angeles (ancienne Ligue Nationale).  C'était un as du marketing, un innovateur sans cesse à la recherche d'idées nouvelles pour améliorer le «produit» qu'il devait vendre et rentabiliser.

Et des idées nouvelles et efficaces, il en avait bien besoin pour vendre ses Cowboys et attirer des spectateurs aux matchs locaux.  Les Cowboys ne gagnaient pas souvent durant leur cinq premières saisons, et les foules étaient minimes au Cotton Bowl, le stade où ils jouaient.







 
Durant son passage de trois ans à CBS, le patron des Cowboys avait remarqué que les émissions de télévision qui attiraient beaucoup de téléspectateurs étaient celles où on pouvait voir de belles filles.  Il se disait que pour relever le désolant spectacle offert sur le terrain pas son club de perdants, il pourrait utiliser la même formule qu'à la télé.

Il décida d'engager de jolies mannequins pour  faire de l'animation et inciter les spectateurs à encourager leur équipe de football.  Ce fut un échec.  À des températures atteignant parfois les 100° F, les pauvres filles ne tenaient pas le coup, ni leur maquillage, d'ailleurs !  De plus, Schramm, bien connu pour ternir bien serrés les cordons de la bourse, ne leur versait pas un sou pour leurs services...

Dans ces circonstances, Schramm a dû se contenter d'étudiantes cheerleaders recrutées dans les écoles des environs.  Mais Tex Schramm avait toujours derrière la tête son idée de divertissement avec de belles filles.



INSPIRÉ  PAR  UNE  STRIPTEASEUSE

Cette idée fut renforcée par un incident particulier, lors d'un match local, le 5 novembre 1967, quand Bubbles Cash, une effeuilleuse bien connue à Dallas, descendit lascivement une allée des estrades avec deux bâtonnets de barbe à papa et en portant une mini-jupe.  Depuis peu, cette dernière pièce de vêtement commençait à devenir à la mode aux États-Unis.  Tous les regards des spectateurs se fixèrent sur elle et le match de football fut oublié !

Les hommes, surtout, n'avaient plus d'yeux que pour Bubbles et sa mini-jupe.  Ils étaient pratiquement tous «gagas».  Évidemment, ce genre d'hystérie collective fut remarquée par Tex Schramm qui se dit, en lui-même, qu'il devait trouver le moyen de vendre ce genre de phénomène au profit de son équipe.  Il savait que le «sexe est vendeur».  Il fallait juste trouver une façon de l'intégrer à son marketing.

Et cette façon, ce fut de recruter des jeunes femmes au physique attrayant (comme les mannequins auxquelles il avait d'abord pensé en 1960) courtes vêtues, mais avec bon goût, qui allaient danser (pas comme la stripteaseuse Bubbles Cash, mais l'idée était là) et offrir un spectacle à l'assistance aux matchs locaux des Cowboys.

De gauche à droite : Schramm, Landry et Gil Brandt (vice-président du personnel des joueurs de 1960 à 1988)













UN  SUCCÈS  FOUDROYANT

Ce fut un succès instantané qui prit vite des proportions inattendues.  Toutes les troupes de cheerleaders aux USA, et tous les autres clubs de la Ligue Nationale (devenue la NFL en 1970 après la fusion avec la Ligue Américaine) voulaient copier la nouvelle recette à succès de Schramm.  Voyant cela, ce dernier s'est hâté d'enregistrer et de protéger sa nouvelle marque de commerce.

Schramm, un génie du marketing, a ensuite poussé au maximum son «invention», avec l'aide d'un personnel compétent et du pouvoir des médias, pour faire de l'image de cette cheerleader des Cowboys une icône culturelle qui est d'ailleurs entrée au célèbre Musée Smithsonian de Washington en 2018 (voir mon article à ce sujet sur mon blogue «Bikini and Pom Pom Girls» : https://bikiniandpompomgirls.blogspot.com/2022/06/50-years-ago-in-1972-fashion-designer.html 

Si l'arrivée de ces cheerleaders que l'on surnommerait bientôt les «America's Sweethearts» a soulevé l'enthousiasme de presque tout le monde, et a contribué à faire des Cowboys l'«America's Team», des féministes, ainsi que des groupes conservateurs et religieux, crièrent plutôt au scandale.  Le coach des Cowboys, Tom Landry, un homme prude et un fervent pratiquant de l'église méthodiste, était résolument mal à l'aise devant le spectacle de «jambes en l'air» des cheerleaders de son club.






LANDRY  OFFENSÉ

Landry disait que c'était des «porno queens» (reines pornographiques) sexuellement exploitées pour incliner les hommes à leurs plus bas instincts !  Contrairement à Tex Schramm et au propriétaire de l'équipe, le magnat du pétrole Clint Murchison Jr, Tom Landry était convaincu que le football et le sexe n'allaient pas ensemble.  Il voulait aussi que ses joueurs soient des modèles pour les jeunes garçons du Texas, et qu'ils ne soient pas "distraits" par «autre chose»...

Il faut dire que ses protégés risquaient d'être "distraits" par «autre chose» durant les camps d'entraînement, puisque ceux-ci avaient lieu derrière l'édifice où se trouvaient les bureaux (administration) de l'équipe; et que dans ce même bâtiment de quinze étages il y avait un espace réservé au Club Playboy !  Murchison était aussi le propriétaire de la bâtisse, et il ne se formalisait pas du tout de voir les joueurs des Cowboys luncher à la cafétéria, avec les filles de Playboy, après de longues séances d'un dur entraînement...

Un jour, excédé, Tom Landry se rend confronter Schramm au sujet des cheerleaders sexy des Cowboys (DCC).  Ce dernier l'envoie plus ou moins promener en réfutant ses arguments.  Pour le convaincre que les Pom Pom Girls des Cowboys n'étaient en rien des «porno queens», Schramm lui montre une scène d'orgie du film Debbie Does Dallas.  Dans ce film, des actrices portaient un costume ressemblant à celui des cheerleaders des Cowboys mais...sans la chemise bleue et la brassière de celles-ci (topless) !


IMITÉES  DANS  UN  FILM  PORNO

Évidemment, comme je l'écrivais plus haut, Schramm avait fait enregistrer (trademark)  l'uniforme et le concept de ses cheerleaders, et il traîna les auteurs du film devant les tribunaux où il gagna d'ailleurs son procès pour usage illégal du costume des DCC et du logo de l'équipe.  Faisant visualiser les scènes pornographiques du film à Tom Landry, le patron des Cowboys lui démontra la différence entre les actrices porno et les cheerleaders du squad du club.  Il invita également le coach à visiter la plage la plus proche et à regarder les femmes qui s'y trouvaient...

Même si Landry ne changera jamais d'avis concernant le caractère trop osé et moralement offensant des Pom Pom Girls des Cowboys, il ne reparlera plus jamais de ce sujet à la direction de l'équipe.  Il comprenait que c'était un truc de marchandisage pour donner le maximum de visibilité au club.

Par ailleurs, si Schramm avait beaucoup d'idées pour populariser son équipe, le surnom «America's team» n'était pas de son invention, mais il l'appréciait beaucoup comme marque de commerce.  C'était tout le contraire pour coach Landry qui se plaignait que ce surnom constituait un motif de jalousie, et une motivation supplémentaire, pour les autres équipes, afin de battre les Cowboys quand ils les affrontaient.



UN  COACH  LÉGENDAIRE

Cela n'a pas empêché le légendaire coach de connaître l'une des plus grandes carrière d'entraîneur dans la NFL : vingt saisons gagnantes consécutives, dix-neuf participations aux séries éliminatoires, cinq participations au Super Bowl (deux victoires).  Son reluisant dossier de 271 victoires, 180 défaites et 6 matchs nuls l'a aussi aidé à entrer au Temple de la Renommée en 1990, dix ans avant sa mort (leucémie).

Son règne de 29 ans à la tête des Cowboys (1960-1988, un record de longévité de la NFL pour un coach demeurant avec la même club) fut interrompu quand Jerry Jones a acheté l'équipe.  La première chose que Jones a fait en prenant possession du club c'est de demander à Tex Schramm de congédier Landry.  Schramm refusa net, et préfèra donner sa démission.  Jones congédia lui-même Landry.

En apprenant la nouvelle, le vétéran entraîneur de 64 ans êtait sous le choc.  Lui qui avait toujours projeté l'image d'un homme stoïque, sans émotion, le long des lignes de côté du terrain de football, voilà qu'il laissait couler des larmes de ses yeux lors de la conférence de presse annonçant son renvoi.  «Ils me privent de mon équipe», déclara-t-il, visiblement ébranlé.






CONGÉDIÉ  PAR  JERRY  JONES

Landry mit beaucoup de temps à pardonner son congédiement à Jerry Jones. Plusieurs fois il refusa les invitations de Jones, qui voulait qu'il soit admis au cercle d'honneur des Cowboys, au Texas Stadium.  En 1993, Landry accepta enfin de devenir le huitième membre de ce club sélect (photo ci-dessus).

Un an après son décès, on érigea une statue de bronze de Landry près du Texas Stadium.  Elle fut déménagée au nouveau stade des Cowboys (AT & T) en 2009.  Héros de la deuxième guerre mondiale (aviation), personnage iconique d'un club iconique, Tom Landry fut un grand coach et un brillant innovateur.  Il a inventé la défensive 4-3 (et sa version améliorée nommée «Flex»).  Il a réintroduit l'usage de la formation «shotgun», et il a aussi innové en faisant de nombreuses substitutions de joueurs, selon les situations données.

As des démonstrations d'une multitude de jeux et de formations complexes sur tableaux, avec les commodes "X" et "O", il a aussi introduit l'usage de l'ordinateur pour faciliter les repêchages et analyser les performances de son équipe.  Il avait le don de prévoir l'entièreté de la prochaine série offensive des clubs adverses.  Il attribuait sa façon de penser à sa formation d'ingénieur industriel.


UN  PERSONNAGE  HISTORIQUE

On l'appelait "plastic man", "computer face" ou, parfois "Pope Landry", tellement il impressionnait par ses méthodes et ses marches le long des lignes de touche, vêtu impeccablement de ses élégants habits et coiffé de ses célèbres chapeaux Fedora.  Tant par sa personnalité que par ses exploits, Tom Landry est devenu un personnage historique, reconnu spécialement dans l'État du Texas.  Une rue importante de Dallas a également été nommée en son honneur.